Grèves oubliées en Iran (1980)

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L’Iran dans les archives

Un exemple de la nature déjà anti-ouvrière du tout nouveau régime « républicain islamique » il y a presque trente ans. Article paru dans Le Prolétaire N° 308 (avril 1980).

Fin février, les ouvriers d’une usine pharmaceutique de Téhéran se sont mis en grève. L’affaire a fait du bruit jusqu’à la radio, qui ne dit habituellement rien de rien, le gouvernement iranien a dû consacrer une réunion à se justifier.

Les ouvriers réclament seulement qu’on leur verse leurs salaires que le patron refuse de payer en arguant de la situation économique du pays. Pour le forcer à payer, les ouvriers l’ont attaché avec des cordes.

Des émissaires de Bani Sadr sont venus pour tenter de le libérer. En vain. Il ne restait devant la fermeté des ouvriers qu’à chercher à les déloger par la force. Quelques heures plus tard, les gardiens de la révolution islamique sont arrivés à leur tour, mais cette fois avec leurs armes, en range Rover militaire. Ils ont entouré l’usine et tiré en l’air. Les ouvriers ne se sont pas laissés intimider et des affrontements ont eu lieu.

Malgré la résistance des travailleurs qui ont démoli les voitures des gardiens, ces derniers se sont emparés des bureaux en ouvrant le feu sur les ouvriers. La radio aurait fait état d’une douzaine de blessés.

De tels événements ne sont pas isolés. En décembre, une puissante grève a eu lieu dans une scierie d’Abadan. Les ouvriers, à côté de revendications comme la nationalisation de l’entreprise, réclamaient aussi le salaire aux chômeurs, une augmentation des salaires et la titularisation immédiate de tous les hors-statut.

Fin janvier, les ouvriers d’une usine ont réagi à la mort d’un camarade de travail provoquée par un accident et s’en sont pris aux gérants et au patron. Le chef du « conseil ouvrier islamique » [1] est intervenu pour protéger ces derniers: l’accident du travail n’était pas dû au patron, mais à la « volonté de Dieu »! Les ouvriers ne l’ont pas cru, et se sont mis en grève pour une meilleure sécurité dans l’usine et la « suppression des gérants et des patrons »!

Fin février, il y a eu, toujours à Abadan, une manifestation d’ouvriers actifs, de licenciés et de jeunes chômeurs.

Bani Sadr aura beaucoup à faire pour convaincre la classe ouvrière de sa « dialectique de la non-contradiction »!

Abadan dans les années 80

Abadan dans les années 80

Note :

[1] En juin 1979, le même journal bordiguiste décrivait ces comités islamiques dans les entreprises comme tentant « de canaliser toute l’énergie des prolétaires dans l’épuration des dirigeants corrompus » car « Dans l’immédiat, le parti islamique cherche à reprendre à la classe ouvrière l’espace qu’elle a conquis par l’insurrection. Ce sont les comités islamiques qui tentent de remettre aux femmes le tchador dont elles ont conquis l’abandon par leur entrée massive dans les bagnes industriels, avant leur participation courageuse aux manifestations et à l’insurrection. Ce sont les comités qui tentent de s’opposer à toute expression  des intérêts prolétariens par une presse politique et syndicale indépendante, ce sont eux qui mènent la bataille contre l’organisation sur le terrain de classe. Cette bataille menée avec toutes les ressources de la démagogie religieuse et du mensonge de l’idéologie nationale (…) « 

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Une Réponse to “Grèves oubliées en Iran (1980)”

  1. Neues aus den Archiven der radikalen Linken « Entdinglichung Says:

    […] (1933) * Charles Alligier: L’industrialisation n’est pas le socialisme (1946) * Le Prolétaire: Grèves oubliées en Iran (1980) (1980) * Socialist Standard: Le changement de dirigeants en Iran […]

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