Article publié dans Masses en février 1939.
Il y a 20 ans, grâce aux autos blindées et aux munitions rétrocédées à la République socialiste allemande par la démocratie française, l’insurrection spartakiste était noyée dans le sang.
Du fond de la prison où l’avait conduite sa lutte contre la guerre, Rosa Luxemburg réussit à faire entendre ses cris de révolte et de libération, les lettres de Spartacus.
Karl Liebknecht fut interné dans une maison de force après avoir réussi à mettre sur pied, à Berlin, une grande manifestation qui fit retentir les cris de « A bas la guerre ! Vive la Révolution ! »
Les grèves et les mutineries se succédaient, puis vint la débandade sur le front ouest et l’écroulement de l’Empire. L’heure de la paix et du socialisme allait sonner. La révolution russe n’avait-elle pas montré le chemin ? Les Spartakistes haranguaient les soldats revenant du front. les voix de Karl et de Rosa enflammaient les cœurs, galvanisaient les énergies. Tandis que le gouvernement « rouge » d’Ebert Scheidemann était en pourparlers avec les spartakistes et feignait d’accepter en partie leurs revendications, il rassemblait des mercenaires, officiers licenciés et lie de la population, pour défendre l’ordre bourgeois. Il manquait un chef suprême pour la boucherie. Noske a rapporté dans un livre comme il se proposa: « Dans une excitation assez vive, car le temps pressait et nos gens, de la rue, appelaient pour avoir des armes, on tenait conseil chez Ebert. J’exigeai qu’on prit une décision. Quelqu’un répondit: « Eh bien, fais toi-même la chose ». C’est alors que je pris une rapide décision: « Soit ! L’un de nous doit être le chien sanglant. je ne recule pas devant la responsabilité ». Reinhardt déclara qu’il n’en attendait pas moins. Par une décision verbale du conseil, des pouvoirs très étendus me furent confiés pour ramener l’ordre à Berlin ».
Quelques jours après, Spartacus était noyé dans le sang.
« Je mourrai un jour à mon poste, dans un combat de rue ou en prison »… Les sombres jours de janvier voyaient se réaliser le destin de Rosa Luxembourg. Karl et Rosa, hérauts et guides du prolétariat allemand, lâchement assassinés allaient retrouver dans le même champ de repos les matelots de Kiel massacrés au château Royal, les assiégés du Vorwaerts, 15.000 victimes anonymes d’une lutte désespérée pour la liberté et pour le pain.
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La Révolution de Spartacus nous est particulièrement proche par l’époque où elle eut lieu, par la similitude de notre milieu social et de celui qui lui a servi de terrain et le caractère profondément humain de ses immortels protagonistes, Karl et Rosa. Nous nous efforcerons d’en sauvegarder la dure leçon. Nous gardant de désespérer, nous dirons avec Rosa Luxembourg le jour de la défaite, veille de sa mort, le 14 janvier 1919:
« Seules les défaillances pitoyables sont mortelles, toute défaite héroïque devient la source vivante des énergies de classe pour le prolétariat international tout entier…
« Comment apparaît la défaite de cette fameuse « Semaine de Spartacus » ? Est-ce que ç’a été une défaite de l’audacieuse énergie révolutionnaire et de l’insuffisante maturité de la situation ? Ou bien au contraire, une déroute de faiblesse et de tiédeur dans l’action ?
« Les deux ! Le caractère à double face de cette crise, la contradiction entre l’attitude pleine de force, décidée, offensive, des masses berlinoises et l’indécision, la timidité, le manque de conviction des chefs berlinois est la caractéristique particulière de cet épisode le plus récent.
« La direction a avorté. Mais la direction peut et doit être créée par les masses et sortir des masses. Les masses sont le facteur décisif, elles sont le rocher sur lequel la victoire finale de la révolution sera édifiée. les masses étaient à la hauteur elles ont fait de cette « défaite » un chaînon de ces défaites historiques qui sont l’orgueil et la force du socialisme international. Et à cause de cela, c’est de cette « défaite » que fleurira la victoire prochaine.
« L’ordre règne à Berlin !» O bourreaux stupides ! Votre « ordre » est construit sur le sable. La révolution se dressera demain dans toute sa hauteur avec fracas, et votre terreur elle annoncera avec toutes ses trompettes: J’étais, je suis, je serai ! ».
21 juin 2012 à 09:43
[…] Bataille socialiste Spartacus 1919-1939Article publié dans Masses en février 1939. Il y a 20 ans, grâce aux autos blindées et aux […]
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